La chaire de recherche et d’enseignement « Mines Urbaines » est créée en 2014 par l’éco-organisme ecosystem en partenariat avec la Fondation ParisTech et trois grandes écoles : Arts et Métiers, Chimie ParisTech et Mines ParisTech. Elle a pour vocation de construire une véritable économie circulaire, respectueuse de l’environnement et des citoyens. Elle vise à prospecter, découvrir et exploiter des matériaux à partir d’un nouveau type de « mines » répandues dans nos villes : les DEEE (Déchets d’Équipements Électriques et Électroniques).
Des ressources stratégiques mais limitées
Nous savons tous qu’il existe de nombreux composants et matériaux différents dans nos téléphones portables et plus généralement dans les équipements électriques et électroniques (EEE) qui peuplent notre quotidien.
L’Indium par exemple permet la tactilité des écrans, le tantale sert pour les condensateurs en micro-électronique, le néodyme est un élément utilisé dans les disques durs, l’yttrium pour les lasers… Ces éléments sont appelés « terres rares » en raison de leurs ressources parfois extrêmement limitées.
Nous nous servons également de métaux précieux tels que l’or ou l’argent notamment pour les soudures et les contacts électriques en raison de leur pouvoir conducteur.
Il existe environ une soixantaine d’éléments différents dans nos téléphones portables dont la plupart sont stratégiques pour l’électronique et les gisements très limités.
Une prise en compte par l’Union européenne
Nous dépendons de ces éléments, dont les ressources s’épuisent, intégrés dans les EEE et présentant, par ailleurs, un danger pour l’environnement. Les matériaux qui composent ces EEE (métaux ferreux et non ferreux, métaux rares, verre, plastique…) et dans lesquels sont incorporés ces éléments dangereux et stratégiques présentent par ailleurs un fort potentiel en terme de recyclage.
Pour répondre à ces enjeux économiques et environnementaux, l’Union européenne a défini le cadre de la gestion des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) à travers une directive du 27 janvier 2003.
La filière de collecte et de recyclage des DEEE est opérationnelle en France depuis 2005 pour les DEEE professionnels et depuis 2006 pour les DEEE ménagers. Elle incombe à l’éco-organisme ecosystem financé par l’éco-redevance acquittée lors de l’achat de tout appareil électrique ménager (gros ou petit), de tout équipement informatique et des télécommunications (TV, PC, téléphones portables…), de tout outil électrique ou électronique (outillage)
Un appel d’Ecosystem en faveur d’une chaire de recherche
Le problème est que tous ces éléments sont très difficiles à séparer et l’on peut même dire que les technologies de la séparation des composants sont souvent plus complexes que les technologies de l’extraction minérale !
Daniel Froelich, professeur d’université, institut Arts et métiers de Chambéry.
Parmi ces composants on retrouve une grande quantité de plastiques et notamment des plastiques avec retardateurs de flammes bromés. Il y a également un enjeu à séparer ces plastiques entre eux dans un objectif de recyclage puisque l’atteinte des taux de recyclage demandés par la réglementation européenne ne peut être acquise sans recycler les matières plastiques contenues dans ce type de produits.
En 2013 ecosystem a donc décidé de créer une chaire de recherche et fait appel à trois écoles : Chimie ParisTech pour travailler sur de nouveaux procédés de séparation des éléments stratégiques et Mines ParisTech pour travailler sur de nouveaux modèles économiques de financement du recyclage.
L’école d’Arts et Métiers est choisie pour travailler sur de nouveaux procédés de tri et de recyclage des plastiques car l’institut de Chambéry est à ce moment-là un acteur-clé sur ce sujet. L’enjeu est avant tout d’éliminer du recyclage les plastiques avec retardateurs de flammes qui représentent environ 10% des matériaux plastiques contenus dans les DEEE ménagers.
Sources de matériaux stratégiques, variés et continuellement renouvelés, les DEEE sont de véritables « mines urbaines », innovantes, disponibles et répandues dans notre société.
La chaire Mines Urbaines est donc née à l’initiative d’ecosystem en partenariat avec la Fondation ParisTech et trois écoles dont Arts et Métiers. Sa saison 1 s’étend de 2014 à 2019.
Une approche résolument circulaire pour la saison 2 : 2019-2024
Les deux écoles, Chimie ParisTech et Mines ParisTech, sont sur les mêmes orientations scientifiques mais davantage sur le recyclage pour la première et sur l’économie circulaire et les nouveaux business models pour la seconde.
Du point de vue des plastiques, traité par Arts et Métiers, on est davantage sur une dimension « cycle de vie » c’est à dire non seulement sur le procédé de tri mais également sur les filières à mettre en place et comment intégrer le fruit d’une filière, qui est une matière recyclée, dans de nouveaux produits. Comment faire pour que les produits d’aujourd’hui soient éco-conçus afin d’intégrer la filière. On est sur une approche filière, ce qui permettra ensuite de donner des orientations à ecosystem pour qu’il puissent eux-mêmes donner des indications a leurs acteurs en terme de technologies de tri, de matières plastiques stratégiques à récupérer compte tenu des évolutions des produits… sachant qu’il y a également une problématique avec les substances contenues dans les plastiques.
On s’intéresse au cycle de vie des substances dans les matières plastiques. Il faut anticiper le recyclage et donc limiter par exemple la présence de certaines substances préjudiciables pour le recyclage, le tri, les utilisateurs. C’est vraiment une vision cycle de vie.
Carole Charbuillet, ingénieure de recherche, institut de Chambéry, responsable de la chaire Mines Urbaines pour Arts et Métiers.
Cette thématique des plastiques prend d’autant plus d’ampleur compte-tenu de la nouvelle loi sur l’économie circulaire qui impose de prendre en compte les enjeux environnementaux des plastiques.
L’enjeu aujourd’hui repose sur tous les petits appareils « en mélange »
Smartphones, tablettes, radio…. Ils contiennent de l’électronique avec une problématique « métaux critiques « et contiennent des plastiques avec une problématique de mélange (des résines différentes et des additifs différents). Aujourd’hui ce sont souvent des produits que l’on broie, que l’on ne démantèle pas compte tenu de leur taille (ce n’est pas comme un frigo), compte tenu de la diversité et du faible poids des composants et aussi de la proximité en termes de propriétés de certaines matières. On arrive en partie à séparer des composants (polypropylène/ABS) mais ce n’est pas suffisant.
Le laboratoire PIMM travaille sur le vieillissement, l’étude de la dégradation des matières plastiques et le développement de nouveaux process de recyclage et notamment sur la production de nouvelles matières contenant plusieurs éléments non triés.
Le laboratoire I2M développe des indicateurs d’éco-conception en lien avec la filière.
L’équipe de Chambéry, rattachée à I2M apporte les éléments économie circulaire/cycle de vie : comment concevoir pour s’adapter à la filière et comment concevoir la filière pour qu’elle puisse intégrer de la matière dans les produits. L’institut est aujourd’hui référent sur la thématique de prise en compte des impacts environnementaux des plastiques contenus dans des produits complexes tout au long de leur cycle de vie.
Une douzaine de personnes d’Arts et Métiers sont impliquées en tout.