Enseignante-chercheuse à Arts et Métiers et doctorante sur l’acceptabilité des agents intelligents, Magali Gourlay-Bertrand explore les enjeux éthiques, réglementaires et sociétaux liés à l’intégration de l’IA, au sein du projet CAIRE.
Peux-tu te présenter en quelques mots et expliquer ton rôle dans le projet CAIRE ?
Je suis Magali Gourlay-Bertrand, enseignante à l’École Nationale Supérieure d’Arts et Métiers (ENSAM), en sciences de gestion - management depuis maintenant 5 ans, sur le campus d’Angers.
Dans le cadre du projet CAIRE, je m’intéresse particulièrement à l’aspect réglementaire et éthique lié à l’intégration des systèmes d’IA notamment dans les environnements professionnels. Mon rôle porte sur l’analyse des cadres de responsabilité, de régulation et de gouvernance associés à ces technologies, ainsi que sur l’identification des biais et des enjeux éthiques concrets que soulève leur déploiement.
Ma légitimité particulière sur ces questions tient au fait que je suis actuellement en troisième et dernière année de doctorat, sur la thématique de l’acceptabilité des agents intelligents contemporains dans les organisations - une thèse menée au sein des laboratoires LIRSA (Cnam Paris), sous la direction de Cécile Dejoux et LAMPA (Arts et Métiers - Angers Laval), sous la direction de Simon Richir et de Sylvain Fleury. Ce travail me permet d’articuler des enjeux de recherche académique avec des questionnements concrets d’intégration.
Qu’est-ce qui te motive particulièrement dans ce projet ?
Ce qui me motive dans le projet CAIRE, c’est la possibilité de croiser des approches techniques et sociétales pour penser l’IA autrement que comme une simple innovation technologique.
J’y vois une très belle opportunité de nourrir notre réflexion collective sur la manière dont ces systèmes doivent être pensés, intégrés de façon responsable.
Une ressource que tu recommanderais sur l’IA ?
Dans cette perspective, je suis forcément sensible à des ouvrages qui replacent les technologies dans leurs dynamiques de pouvoir : Cyberpunk d’Asma Mhalla (2025), pour sa dimension techno-politique et géostratégique des infrastructures numériques et de l’IA, dans la lignée de la réflexion de l’auteure sur les Big tech/Big states, L’Âge du capitalisme de surveillance de Shoshana Zuboff (2019), un bel ouvrage qui analyse en profondeur les problèmes sociétaux d'une économie basée sur l’exploitation des données et la logique des grandes plateformes. Les ingénieurs du chaos de Giuliano Da Empoli (2019) (et ce dernier vient également de sortir L’heure des prédateurs que je n’ai pas encore lu, mais il figure sur ma liste !).
Ce sont de bonnes références pour une meilleure compréhension des stratégies d’influence politique et sociale qui s’appuient sur les technologies numériques, dans un contexte particulièrement préoccupant. Ces ouvrages rappellent que l’IA reflète et amplifie les structures de pouvoir dans lesquelles elle s’inscrit. Il ne s’agit pas seulement de maîtriser une innovation, mais de décider consciemment et collectivement des espaces que nous voulons lui ouvrir et de ceux qu’il nous faut préserver.